Alors qu’on nage en plein bouleversement climatique, que les tribunes et cris d’alerte se succèdent pour réduire urgemment et drastiquement les émissions de gaz à effet de serre qui sont reparties à la hausse cette année, et que le sommet de Bonn a de nouveau failli à prendre l’ampleur de l’urgence, voilà qu’on apprend par Mediapart que l’Agence française de développement s’apprête à accorder un prêt de 41 millions d’euros à la Chine pour soutenir un projet lié à une méga-centrale à charbon ! Et ce, alors que durant la même Cop à Bonn une dizaine de jours plus tôt, Rémy Rioux, le Directeur général de l’AFD, assurait lors d’une rencontre où lui était posée la question des infrastructures fossiles que l’AFD ne finançait « plus aucun projet charbon » (voir ici le récit de Nicolas Haeringer de 350.org). Hashtag cohérence, climat et Cop23… Face à la protestation, l’AFD a reporté l’étude du prêt, mais ne l’a pas (encore) annulé.

De son côté, Emmanuel Macron tente de se poser en champion du climat, comptant sur une sorte d’amnésie aveugle de masse sur le Ceta, le recul sur le nucléaire, la mine d’or et le permis Total en Guyane, la fin des aides au maintien de la bio et autres joyeusetés (voir le rapport complet d’Attac, page 18). Et comptant certainement sur l’effet de comparaison avec Donald Trump. C’est vrai que c’est tentant, et qu’à côté du président États-unien tout le monde peut avoir l’air écolo à peu de frais à part peut-être le président polonais Andrzej Duda qui accueillera l’an prochain la COP 24 à Katowice, ce qui au passage promet. Mais comme l’a rappelé Naomi Klein lors de son passage en France, il ne suffit pas de faire mieux que Donald Trump pour devenir le champion du climat. Loin s’en faut. Il suffit pour s’en convaincre de revoir cette séquence hilarante totalement consternante sur Donald Trump et le “charbon propre” : comme disent les jeunes, “y a du level”.

Voilà voilà…

Bref, Monsieur Macron peut bien faire toutes les “punchlines” #makeourplanetgreatgain du monde, ça nous fait une belle jambe. Il nous faut des actes. Et vite.

  • Premier acte : le 29 novembre je défendrai l’amendement ci-après au nom de notre groupe du Rassemblement à la Région (enfin s’il n’est pas retoqué par le cabinet de Laurent Wauquiez qui adore dégommer nos propositions – voir notre vidéo ici) demandant qu’on cesse d’avoir recours aux banques et organismes qui alimentent les paradis fiscaux et soutiennent les investissements dans les énergies fossiles… Au hasard, dans les éléments de bilan du budget régional, la Société Générale à elle seule représente 450 millions sur la ligne « emprunts et dettes » de la Région.
  • Deuxième acte : le 12 décembre, rendez-vous au petit matin à Paris pour réclamer « pas un euro de plus » pour les énergies du passé, histoire d’ambiancer un peu le sommet « vert » de Monsieur Macron, dédié au financement des alternatives et de l’adaptation au changement climatique.

(Ah et au passage, si Monsieur Macron cherche des idées de financement, euh… On peut lui rappeler que sa réforme de l’impôt sur la fortune va nous coûter 3,2 milliards d’euros et sa « flat tax », le prélèvement forfaitaire unique (PFU), 10 milliards selon l’économiste Gabriel Zucman. De quoi financer deux-trois petits projets innovants.)

Amendement au budget 2018 de la Région Auvergne Rhône Alpes : « Sortir des paradis fiscaux et des énergies fossiles »

Après les différents rapports comme ceux d’Oxfam, le récent scandale des Paradise Papers a une fois de plus jeté une sombre lumière sur les pratiques des banques françaises. A titre d’exemple, la Société Générale réalise 22% de ses profits dans des paradis fiscaux mais n’y emploie que 4% de ses salariés pour réaliser 10% de son chiffre d’affaires. En Irlande, la Société Générale a réalisé 4 fois plus plus de bénéfices que de chiffre d’affaires et trois banques, dont le Crédit Agricole, n’ont payé que 2% d’impôts. Aux îles Caïman, on retrouve les quatre plus grandes banques françaises, BNP, BPCE, Crédit Agricole et Société Générale. La BNP y dégage 134M d’euros de bénéfices, auxquels s’ajoutent 23M à Monaco, ou encore 22M aux iles anglo-normandes et de Man. La Banque européenne d’investissement (BEI) quant à elle a investi près de 500 millions d’euros dans des fonds localisés dans des paradis fiscaux ces dernières années.

Ces pratiques soulèvent une légitime indignation de la part de celles et ceux qui payent l’impôt en France et nous prive de ressources publiques pour mener à bien nos politiques dans un contexte de baisse des dotations de l’État et d’austérité forcée dans les collectivités. La Région se doit d’être exemplaire et cesser de coopérer avec ces banques.

Monsieur Wauquiez ne cesse de souligner que la Région n’augmente pas l’impôt, commençons par nous engager à ne pas travailler avec ceux qui s’affranchissent des règles communes.

Par ailleurs, il est à souligner que face à la mobilisation citoyenne, la BNP Paribas, la Société Générale et le Crédit agricole ont du acter leur retrait du plus grand projet charbonnier au monde, dans le bassin de Galilée, en Australie. Cela s’inscrit dans un mouvement massif de désinvestissement du secteur des énergies fossiles. Dans le contexte de dérèglement climatique et face aux échecs des gouvernements à s’engager fermement sur des réductions des émissions de gaz à effet de serre, les collectivités aussi s’engagent.

En juin 2015, la région Rhône-Alpes a adopté un vœu soutenant le désinvestissement des énergies fossiles, demandant :

– à la Caisse des Dépôts et à la Banque publique d’investissement de renoncer à toute participation dans les projets favorisant l’extraction et/ou la production d’énergie à base de combustibles fossiles ; – aux organismes proposant une retraite par capitalisation aux élus locaux ou aux agents de la fonction publique territoriale, de renoncer à tout placement dans le capital ou les produits financiers des entreprises du secteur des énergies fossiles.

Des motions dans ce sens ont également été adoptées par le Conseil de la ville de Paris, la région Île-de-France, le département de la Gironde. Selon le réseau 350.org, plus de 30 collectivités françaises ont récemment rejoint l’initiative – Saint-Denis, Lille, Bordeaux, Dijon, Rennes… mais aussi la London School of Economics qui va désinvestir 138 millions d’euros des compagnies travaillant dans le charbon ou les sables bitumineux, les universités de Stanford, Yale, Harvard, Glasgow ou Oxford, le Science Museum de Londres, certains des principaux fonds de pension ou le gigantesque fonds souverain de Norvège ou encore Allianz, la première compagnie européenne d’assurance. Une quarantaine d’organisations catholiques se sont engagées enfin le 3 octobre 2017 à se désinvestir totalement des énergies fossiles.

… Et l’agence de notation américaine Standard and Poor’s, rappelons-le, inclut désormais le risque climat dans ses éléments de notation.

Ce budget est l’occasion de réaffirmer l’engagement de la Région sur ce sujet.

Amendement :

Ajouter le point suivant :

I-4) d’approuver le principe de non recours de la Région aux organismes et banques disposant de filiales dans des paradis fiscaux et/ou soutenant des projets d’investissement dans les énergies fossiles